Le duo mythique Basquiat x Warhol offre une explosion de couleurs et d’énergies dans toutes les galeries de la Fondation Louis Vuitton du 5 avril au 28 août 2023. L’exposition « BASQUIAT x WARHOL, À quatre mains », enthousiasme petits et grands avec la présentation de plus de trois cent œuvres et documents dont soixante-dix toiles réalisées par les deux artistes, à quatre mains, à tour de rôle en étant toujours proches l’un de l’autre. Plus de cent soixante œuvres ont été créées en commun entre 1983 et 1985. Souvent Warhol commençait la toile en y apposant un symbole, le gros titre d’un journal ou un logo d’un produit de la grande consommation puis Basquiat se lançait vigoureusement dans la poursuite de l’œuvre avec de la peinture, des collages et des photocopies. Leur extraordinaire collaboration était un dialogue artistique puissant, fruit d’un nouveau langage visuel.
L’exposition « BASQUIAT x WARHOL, À quatre mains » restitue la scène artistique incroyablement dynamique du downtown new-yorkais des années 1980, avec, entre-autres trésors, la célèbre série de photographies de Michael Halsband, dévoilant Basquiat & Warhol dans une complicité ludique, portant des gants de boxe pour rendre hommage aux boxeurs. Plus de cent clichés ont été pris ; quatre-vingt photographies sont exposées dans la galerie 5.
Des œuvres individuelles de Andy Warhol (1928-1987) et de Jean-Michel Basquiat (1960-1988) sont également exposées ainsi qu’un ensemble de travaux d’autres artistes tels que Francesco Clemente, lui aussi a travaillé sur des toiles communes, Keith Haring, Jenny Holzer, Kenny Scharf, Michael Halsband, … montrant à quel point les années 80 étaient l’âge d’or du monde de l’art.
La rencontre Basquiat avec Warhol
Le lundi 4 octobre 1982, Bruno Bischofberger, grand collectionneur d’art, invite Warhol et Basquiat à un déjeuner. Warhol a pris une photographie avec son Polaroid spécial portrait en duo avec Basquiat. Basquiat les quitte précipitamment pour aller peindre ce double portrait sur une toile de 150 x 150 centimètres et l’a offert une heure et demie après, encore fraîche, à Warhol qui fut sidéré par la rapidité d’exécution et par le talent de Jean-Michel. Dès lors, une amitié s’installa entre les deux artistes. Bruno Bischofberger leur suggéra de peindre ensemble, alors que Warhol ne peignait plus depuis longtemps. Basquiat lui en a redonné le goût et son énergie exceptionnelle entraîna Warhol dans une nouvelle mouvance artistique extraordinaire et historique. Les deux artistes faisaient du sport et peignaient ensemble quotidiennement. Grand frère, père et parfois mentor, Andy aimait profondément Jean-Michel, tant sur le plan artistique qu’intellectuel. Jean-Michel était également fasciné par Andy, icône de l’art contemporain. Sur le plan créatif, ils étaient à égalité, chacun apportant sa contribution personnelle aux œuvres créées et l’ensemble était une pure alchimie. Souvent, plusieurs toiles étaient peintes concomitamment. Leur relation était vraiment sincère et authentique pendant toute cette période de collaboration.
Andy et Jean-Michel étaient cependant de générations et de milieux différents. Leur style de peinture était lui aussi, très différent. Ensemble, ils ont peint, chacun à leur manière, les réalités de la vie.
Les artistes œuvraient toujours en musique et leurs travaux mélangeaient la peinture, les collages, les graffitis, les dessins et les croquis. Ils faisaient aussi des performances et Warhol réalisait des films, pas toujours appréciés du grand public, car souvent érotiques et mettant en scène des homosexuels face à un public puritain et malheureusement totalement homophobe. Il fallait s’appeler Warhol pour oser transgresser à ce point. Warhol a, en effet, cassé toutes les règles cinématographiques de l’époque. Il ne créait pas seulement de l’art, il fabriquait une culture contemporaine, la culture Pop Art. Basquiat a créé son propre style, commençant par réaliser des graffitis dans les rues, sur des T-Shirts et des cartes postales, puis peignant des œuvres au format grandiose avec des thèmes dénonçant ce qui le touchait particulièrement, comme le racisme, les violences policières, les ségrégations, l’intolérable… Il fut le premier afro-américain à s’imposer dans le monde de l’art grâce à son talent et à la remarquable vitalité et originalité de sa peinture. Basquiat plaçait l’humain au-dessus de tout. Andy et Jean-Michel étaient fascinés l’un par l’autre et cherchaient la lumière et la chaleur de l’autre pour accroître leur créativité et intensifier leur ferveur.
Une exposition spectaculaire
La Fondation Louis Vuitton nous invite à découvrir un des épisodes les plus intenses de l’art de la seconde moitié du XXe siècle. Les deux artistes ont créé des œuvres « à quatre mains » non seulement pour explorer leur propres émotions et sentiments mais aussi pour nous faire entrer dans leurs dialogues artistiques où s’entrecroisent des drames, des violences policières, des images pop, des dessins, des signes et des symboles souvent ironiques.
Leur collaboration est le parfait témoignage de la profondeur et de l’importance de leur amitié, d’une complicité hors norme. Leurs trajectoires furent flamboyantes et singulières, pour ne pas dire magique. Les tableaux que nous verrons sont la preuve physique de leur complicité et de l’harmonie qui existait entre eux, au-delà du travail artistique. Chacun poussait l’autre à se surpasser. Comme le titre du livre The Third Mind écrit par William S. Burroughs et Brion Gysin, Keith Haring explique, dans Painting The Third Mind, que la fusion de ces deux esprits extraordinaires a créé un troisième esprit, unique et totalement distinct.
Nous découvrons des œuvres profondément originales, imprévisibles, au format monumental pour certaines, plusieurs sont puissantes et sans compromis et d’autres non jamais été exposées auparavant. Le parcours propose les thèmes suivants : « Une amitié » ; « Basquiat, Clemente, Warhol » ; « La création d’un langage visuel » ; « Larger than life » ; « Natures Mortes » ; « Michael Halsband : 10 juillet 1985, New York »; « En série » ; « La scène artistique de downtown New York dans les années 1980 » ; « Storytelling » ; « Ten Punching bags (last supper) » ; « Headlines Paintings » ; « À quatre mains » et pour clore ce voyage artistique ineffable, la galerie 11 propose « Requiem ».
Cette grande exposition est exceptionnelle et mémorable !
Florence Courthial