Synopsis
Italie 1609. Accusé de meurtre, Le Caravage a fui Rome et s’est réfugié à Naples. Soutenu par la puissante famille Colonna, le Caravage tente d’obtenir la grâce de l’Église pour revenir à Rome. Le Pape décide alors de faire mener par un inquisiteur, l’Ombre, une enquête sur le peintre dont l’art est jugé subversif et contraire à la morale de l’Église.
Dès les premières secondes du film le spectateur plonge dans l’atmosphère sombre et violente des rues de Rome au début du XVIIe siècle. Le Caravage est pris dans une embuscade au coin d’une rue et blesse mortellement un homme. Il fuit Rome pour Naples et va être espionné par l’Ombre, un inquisiteur d’une froideur et d’une intransigeance sans faille.
Caravage est un artiste extrêmement talentueux mais il est transgressif et près à tout pour rester un homme libre. Il peint toujours ce qu’il voit, « Je cherche le réel. » comme il s’évertue à expliquer à ceux qui l’accusent de perversion. Caravage a vécu au milieu des pauvres. Une des scènes les plus marquantes du film est la mise à mort de la vierge que Caravage exécute in situ après l’assassinat de sa muse préférée. Il peint le réel, l’instant, surtout pas le sacré biblique conventionnel et académique comme souhaite l’église. Il peint la vie et la vie est sacrée. Son atelier est fréquenté par des commerçants, des prostituées, des nobles et des prélats qui sont des grands collectionneurs d’art. La vision religieuse du Caravage est totalement novatrice et révolutionnaire car ses modèles sont des personnes de la rue et les femmes de sa vie. Il peint, par exemple, une Sainte Marie Madeleine en prenant pour modèle une prostituée ou encore, il choisit un mendiant pour incarner Joseph. Pour lui, c’est un profane qui doit incarner le sacré.
Caravage est le peintre le plus sulfureux de l’histoire de l’art, dont la vie tumultueuse est aussi fascinante que ses peintures.
Le souhait de faire ce film remonte à 1968 lorsque le réalisateur, Michele Placido, passait ses après-midi Piazza Campo de’ Fiori à Rome avec ses collègues du Conservatoire. Là, flottait le souvenir du moine dominicain et philosophe Giordano Bruno, exécuté sur cette même place, faisant remonter des discussions autour de cette époque historique où se côtoyaient la papauté, la noblesse et la misère. Caravage y cherchait sa place, se chercher lui-même, ce qui donna envie au réalisateur de montrer le peintre dans toute son authenticité, partagé entre ses vices et ses vertus, son humanité profonde et viscérale dans une Rome perverse et cruelle, emplie d’espions pro-français ou pro-espagnols avec une criminalité incessante. Michele Placido nous révèle la dualité du Caravage et comment il se confrontait au monde qui l’entourait. Le film est noir et porté par une reconstitution fidèle de l’Italie du XVIIe siècle, avec des toiles recréées de manière précise, comme si l’artiste venait de les exécuter…
Michele Placido illumine la noirceur impénétrable d’un génie dont les chefs-d’œuvre peints avec un talent et une vérité exceptionnels troublent le regardeur.
Ce film est magnifique, puissant et prégnant ; le spectateur a l’impression de vivre et de rentrer dans les tableaux du Caravage pendant près de deux heures, plongé dans le clair-obscur d’une salle de cinéma mais surtout dans le clair-obscur des toiles de l’artiste.
Les acteurs, surtout, Riccardo Scamarcio qui est le Caravage, incarnent parfaitement les personnages du biopic.
Ce film a une texture rare. Les couleurs et les images sont envoûtantes, cruelles parfois comme il se doit. L’art et la beauté sont omniprésents en Italie et ce film nous transporte dans l’esthétisme à fleur de peau du Caravage.
Du grand cinéma, du grand art, à voir et à revoir sans modération ! C’est aussi une belle occasion de redécouvrir les chefs-d’œuvre du peintre, dont certains sont exposés au Louvre.
Pour mémoire, Michelangelo Merisi da Caravaggio, francisé Caravage ou le Caravage, est un peintre italien né le 29 septembre 1571 à Milan et mort le 18 juillet 1610 à Porto Ercole. Son œuvre puissant et novateur révolutionne la peinture du XVIIe siècle par son caractère naturaliste, son réalisme parfois brutal et l’emploi appuyé de la technique du clair-obscur. Le Caravage connaît la célébrité de son vivant et influence nombre de grands peintres après lui, comme en témoigne l’apparition du caravagisme.