Depuis le 15 janvier, date de la naissance de Molière, Versailles fête Molière, avec « Molière, la fabrique d’une gloire nationale », une belle et passionnante exposition qui lui rend hommage au sein du magnifique Espace Richaud. Les visiteurs découvrent la vie foisonnante de ce grand artiste au destin singulier. L’auteur comique du ‘Grand Siècle’ est aujourd’hui le dramaturge le plus lu, joué et traduit dans le monde. Auteur, comédien, directeur de troupe, metteur en scène et organisateur de fêtes et de divertissements royaux, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière (Paris, 1622 – Paris, 1673) fait partie intégrante de notre imaginaire collectif. Ce génie enchante nos vies mais, qui se cache derrière celui qui est devenu, au fil du temps, une gloire nationale ?
L’exposition « Molière, la fabrique d’une gloire nationale » organisée et coordonnée par les équipes de l’Espace Richaud et du Musée Lambinet, rassemble plus de deux cents œuvres à travers différents objets et médias tels que des éditions anciennes et modernes, des archives de manuscrits, des registres, des relevés de mise en scène, des esquisses préparatoires, des photographies de plateau, des photogrammes, des affiches, des peintures, des sculptures, des dessins, des aquarelles, des costumes, des maquettes de décors, des œuvres graphiques, des caricatures, des bandes dessinées, des produits dérivés, des objets ornementaux ainsi que des projections audiovisuelles. Tout semble être là pour retracer la vie et l’œuvre de Molière.
Le parcours de l’exposition se fait en quatre temps : la généalogie du grand homme (1622-1705), la fabrique d’une légende (1705-1922), le mythe revisité (1922-2022) et enfin, dans la Rotonde centrale, Molière « en costumes ».
Il y a ce qu’on sait de Molière et tout ce qu’on ne saura jamais car Molière n’a laissé aucun manuscrit écrit de ses mains, ni aucune correspondance alors qu’il a échangé avec ses proches pendant ses déplacements dans toute la France. Un vide qui a autorisé ses héritiers à inventer une tradition et a inspiré nombre d’affabulations, la plus connue étant celle d’un Corneille qui écrivait les textes de Molière.
Chaque époque depuis les premières créations de Molière a inventé « son » Molière.
Dans cette ancienne chapelle, ancien hôpital royal, la scénographe de l’exposition a essayé d’insuffler l’esprit Molière. Mais qu’en est-il exactement ? Cette exposition a essayé de déconstruire la légende et de la « re-contextualiser », du saltimbanque au favori.
Molière était beaucoup plus qu’un homme de théâtre, les fêtes qu’il organisait pouvaient durer plus de huit jours. Il est une grande star, tantôt adulé ou tantôt détesté.
On découvre à l’étage un Molière hors hexagone, tel qu’il a été vu par les peuples étrangers qui s’en sont saisi, en Afrique du Nord et en Asie. C’est un Molière international et transculturel. Un grand nombre d’affabulations gravitent autour de l’artiste ; à titre d’exemple, un comédien ne pouvait absolument pas déjeuner ou dîner à la table du Roi contrairement à ce que les médias peuvent colporter. C’était impensable à l’époque qu’un Roi ou une Reine puisse partager des moments intimes avec des comédiens ou toutes personnes non issues du royaume.
Une des choses qui le singularise de ses contemporains c’est son sens critique et sa gauloiserie. Gauloiserie parce que chez Molière, il y a aussi une sorte de crudité voire même d’obscénité… par exemple dans L’École des femmes…
C’est grâce aux nombreux inventaires que des costumes portés par Molière ont été reproduits et sont visibles à l’étage.
De très nombreuses gravures et grands tableaux montrent le faste d’antan, que Molière n’hésitait pas exagérer dans ses pièces de théâtre.
Globalement, on s’aperçoit qu’il y a deux Molière : le Molière des comédiens et le Molière des auteurs.
L’exposition nous propose aussi d’apprécier l’artisanat relatif au monde du théâtre, les couturiers, les scénographes, les costumières qui révèlent une quinzaine de métiers différents, tous collaborent à partir de documents préparatoires, plans, maquettes, échantillons de tissus, …
Les grandes aventures d’un Molière populaire du vingtième siècle sont ici retracées, avec, pour exemple, le Festival d’Avignon dont le Don Juan a attiré plus de 300.000 spectateurs sur une dizaine d’années. Il est une figure du héros moderne. De très beaux hommages rendus à Molière apparaissent ça et là tout au long du parcours.
Le focus est donné sur les grandes mises en scène de Molière, considérées depuis Jacques Copeau et Louis Jouvet jusqu’aux représentations actuelles.
De grandes tournées ont eu lieu dans le monde entier et sont retracées grâce à des affiches et des costumes.
La scénographie de cette très belle exposition reflête merveilleusement la théâtralité de ce génie absolu des lettres, des êtres et des arts.
Pendant toute la durée de l’exposition, des films sur Molière sont présentés en partenariat avec l’UGC Roxane de Versailles et des pièces de théâtre au Théâtre Montansier.
Florence Courthial